Slide listening (2017)
Instrumentation: concertino for piano and orchestra
Duration: about 9 minutes
Premiere: March 5th 2017 by the three finalists of Piano Campus international piano competition.
Orchestre Melodix, conducted by Fabrice Parmentier
National Theater of Cergy-Pontoise
Publisher : Éditions Musicales Artchipel
Commission: Pascal Escande for Piano Campus competition
Slide-listening est une pièce écrite pour piano et orchestre qui s’éloigne quelque peu de la forme classique du concertino dans le rapport entre le soliste et l’orchestre. Ici le discours ne s’établit pas au sein d’un axe confrontation/dialogue, mais plutôt dans une volonté d’orchestrer l’instrument soliste, de créer une sorte de piano augmenté par l’orchestre. Ce dispositif compositionnel filtré laisse s’échapper quelques résidus orchestrés et autres textures autonomes pensées comme des respirations d’ordre environnemental, proches du design sonore.
La forme et le matériau convergent dans la figure du glissement. Du glissement de l’archet sur les cordes au glissement de clusters diatoniques au piano, du glissement des flutes à coulisses au glissement de la superball sur le tam, du glissement d’objets musicaux au glissement des situations d’écoute, ces diapositives sonores s’entrechoquent à un tempo soutenu.
Cette pièce, créée par les finalistes du concours international Piano Campus 2017, met par ailleurs en jeu ce que j’appelle des OEM (objets esthétiquement modifiés) issus du concerto pour piano de Schumann (au programme de la finale). Les OEM sont des fragments musicaux issus de la littérature classique ou traditionnelle ; ces fragments sont, un peu à l’instar des manipulations génétiques, d’abord prélevés, décontextualisés, modifiés esthétiquement, puis confrontés à un nouvel environnement musical.
WhatsPop (2022)
Psychedelic-lyric fresco
Commission : Ensemble Cairn / Ministry of French Culture
Text by Aurélien Dumont
Instrumentation : soprano, debater, clarinet/bass clarinet, trumpet in C, microtonal accordion, electric/acoustic guitar, percussions, cello 1 electronics
Duration : 65 minutes
Dedication : Pacôme Thiellement
Publisher : Éditions Musicales Artchipel
Premiere at Théâtre d'Orléans, 2023 February 7th by Juliette Allen - soprano, Paul Ramage - debater, ensemble Cairn, conducted by Guillaume Bourgogne
Stage direction : Léna Rondé.


Le point de départ de WhatsPop vient de la ma lecture de l’ouvrage de Pacôme Thiellement, L’enquête infinie (PUF, 2021). Dans cet essai, l’auteur convoque, au sein d’un questionnement existentiel passionnant, différentes personnalités qui ont marqué l’histoire de la fin du xixe siècle à nos jours, dont nombre d’artistes. Les résonances créées dans ce labyrinthe temporel y sont à la fois surprenantes et troublantes : l’hétérogénéité des sujets prend une forme singulière où des figures comme Mallarmé, Jarry, Poe, Van Gogh, K. Dick côtoient Moebius, Bowie, Jack l’éventreur ou encore Nicolas Sarkozy. Dans ce panorama à la fois chaotique et jubilatoire manquaient à mes yeux les compositeurs de musiques écrites, expérimentales ou « contemporaines », l’auteur faisant référence à une culture populaire qui s’étendrait du Théâtre élisabéthain au xvie siècle jusqu’aux séries télévisées d’aujourd’hui en passant par le jazz et le cinéma au début du xxe, par le roman de science-fiction et la musique pop dans les années 1960-1970, ou encore par la bande dessinée dans les années 1970-1990. On pourrait aussi voir dans cette chronologie une couleur commune à la fois émancipatrice et fantastique, qui n’est nullement absente des musiques écrites qui peuvent trouver des connexions avec la musique pop. Debussy n’a-t-il pas mis en musique les mots de Poe dans La chute de la maison Usher dont la première trace enregistrée figure sur un concept album du groupe de rock progressif The Alan Parsons Project en 1976 (Tales of History and Imagination) ? Le second disque d’Ummagumma de Pink Floyd ne transpire-t-il pas l’influence d’Edgard Varèse ? Sting n’a-t-il pas interprété les chansons de John Dowland ? En me posant ces questions, je réalise qu’il serait possible de les mettre en regard au sein d’une œuvre musicale qui prendrait une forme proche de l’enquête de Pacôme Thiellement et de faire ainsi dialoguer des références complétements réorchestrées, notamment avec le principe compositionnel des OEM (Objets Esthétiquement Modifiés), avec des pastiches de musique de plateau télé ou de films de science-fiction. WhatsPop débute par une évocation de l’univers musical de Dowland, point de départ d’une musique à la fois savante et populaire. Le discours musical prendra ensuite des formes des plus diverses, du pastiche de musiques populaires au rock à partir d’une orchestration en close up, assez proche de la noise music, avec par moment une présence électronique par simple déclenchements de fichiers sons et une amplification instrumentale discrète. L’incarnation de la chanteuse est polymorphe, entre voix lyrique, baroque, commerciale, de pop-music, de rock, pour devenir progressivement celle d’une androïde, épousant ainsi un grand mouvement progressif de synthétisation du son. C’est la première fois dans mon travail que je conçois et écrit un livret, composé à 60% d’œuvres appartenant au domaine public, dont les fragments sont restitués principalement sous forme de centon et à 40% de textes originaux dont certains s’inspirent de l’œuvre de Philippe K. Dick.Ces expérimentations formelles sont basées sur des tensions esthétiques qui vont d’un Sonnet de Shakespeare à un rapport déclassifié de la CIA, de publicités décalées à un poème de James Joyce. À un moment particulier de l’œuvre jaillira un débat avec un·e intellectuel·le invité·e et en interaction avec les musiciens sur les liens existant entre pop-culture et musique contemporaine, tout en questionnant l’état de conscience des auditeurs de musique en ce début de xxie siècle. Fresque labyrinthique et psychédélique WhatsPop s’apparente à un jeu de pistes où quelques indices sont parcimonieusement distillés entre quatre principaux espaces esthétiques qui tente de cohabiter :- des Cold Open, bande-annonce précédant les parties chantées.- des Song, chansons qui mettent en tension le répertoire avec la pop-music et la musique contemporaine.- des Pop-Advertisement, publicités s’inspirant des têtes de chapitre du roman Ubik de Philip K.Dick.- des Breaking News, qui s’ouvriront sur un débat improvisé en forme de happening avec un·e intellectuel·le ou artiste invité·e. WhatsPop poursuit ainsi mes réflexions sur le renouvèlement de la forme du concert. Cette œuvre se situe également à la croisée d’axes de recherche que sont mon rapport à la musique rock, dont témoigne par exemple ma pièce Zero Syd Barrett & Two Girls Playing Saxophone (2020), et la construction d’une œuvre en forme de « fresque d’OEM » telle qu’expérimentée dans Fragments d’autre (2021), composée à partir de la correspondance entre Albert Camus et Maria Casarès.